Quel avenir pour les Haïtiens?

Récit de Corinne Perron- Extrait d'un mail reçu d'un expatrié revenu en Haïti: "Et sinon, dites moi, c’était bien il y a 6 mois le séisme ? Non je demande ça parce qu’on dirait encore que ça s’est passé la semaine dernière. Des gravats encore partout, des maisons effondrées et inchangées, et des tentes dans toutes les rues, des réfugiés par milliers." Le temps s'est-il arrêté à Port au Prince? Quel avenir reste possible ?

Un minibus s’arrête devant le Palais National. Les passagers, gris-blancs et bedonnants (américains, canadiens ou français ?), caméscopes au poing, filment les ruines impressionnantes du Palais et des ministères qui l‘entourent. Les occidentaux restent dans leur véhicule, à l’abri de la misère autour d’eux, et volent maladroitement les portraits des enfants qui s’attroupent. Le Champ de Mars serait-il devenu la destination de touristes avides de sordide sur leurs cartes mémoire, à l’image de ces drapeaux plantés sur les décombres de la ville?

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Le Champ de Mars est cette place immense, aérée, devant le Palais National, qui a vu tous les rassemblements populaires de l’histoire d’Haïti, les pires et les meilleurs. Aujourd’hui c’est un champ de tentes à perte de vue où on frôle l’asphyxie ; le refuge de ceux qui ont perdu leur maison, leurs parents, leur travail, leurs enfants… Refuge de souffrance et de désolation où un peuple tente de sauver sa dignité. Il lui faudra beaucoup de courage et de patience. Le déblaiement des gravats dans la ville est loin d’être terminé, alors les reconstructions et donc le relogement de tous ces gens ne sont pas prêtes d’arriver. Pour les bidonvilles comme celui de Bristout, les experts les plus sérieux prévoient le début des relogements dans 3 à 6 ans…

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La pluie tombe tous les jours et, cette semaine, des vents violents ont arraché des tentes et paniqué plusieurs dizaines de milliers de familles installées depuis trois mois au camp Corail, un des nombreux camps dans Port-au-Prince. Le mois prochain commence la saison des ouragans. Nous craignons le pire pour les personnes les plus vulnérables. Tiendront-elles encore trois ans ?

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Des manifestations ont commencé à avoir lieu dans les rues de la ville. Il y a les nostalgiques d’Aristide, il y a ceux qui clament le retour de Duvalier… Il y a sans doute une colère instrumentalisée mais il y a surtout une population à ne pas négliger. Il y a cette petite fille qui, coûte que coûte, dans le dénuement total, s’acharne à apprendre à lire et à écrire.

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