Naplouse : "la première maladie c'est la pauvreté".

Le dispensaire de vieille ville est ouvert 3 jours par semaine. Il fonctionne en partenariat avec le centre d'action sociale (MCRC) qui se trouve dans le même bâtiment.

Les consultations sont ouvertes aux femmes et aux enfants de ce quartier pauvre de Naplouse. Les hommes, eux, sont beaucoup plus mobiles et peuvent sortir facilement de la vieille ville pour se rendre dans les hôpitaux. Ce n'est pas le cas des femmes.

Le Dr Nura est la médecin généraliste du dispensaire Help Doctors. Elle participe aussi à l'activité de pédiatrie de l'hôpital Al Watani de Naplouse. Elle consulte 60 % d'enfants, 30 % de femmes et 10% de personnes âgées, dont des hommes.

"J'habite Naplouse depuis toujours. Comme beaucoup de monde ici, je ne connaissais pas vraiment la vieille ville avant d'y travailler avec Help Doctors. J'ai été très surprise et triste de découvrir cette pauvreté. Des familles vivent à 10 personnes dans une seule pièce, dans des conditions d'hygiène terribles", nous a t-elle confié.

"J'ai vu des maladies comme dans les livres de médecines ! Les gens ont si peu d'argent pour se faire soigner qu'ils attendent le dernier moment. J'ai découvert plusieurs cas de diabète chez des jeunes femmes, juste parce qu'elles avaient des infections urinaires à répétitions qui n'étaient pas traitées. Aujourd'hui, elles sont déjà à un stade très avancé de leur maladie et ne comprennent pas qu'elles vont devoir se soigner toute leur vie".


Intisar, 65 ans, veuve, vit seule avec sa fille de 25 ans. A son âge, elle est déjà une "vieille femme" à Naplouse. Sa démarche est hésitante, elle se tient au mur et retombe lourdement sur une chaise. Elle vient parce qu'elle ne peut plus se servir de sa main droite.

Le Dr Nura nous explique : "Je la connais bien. Elle a besoin de se faire opérer pour un Syndrome du Canal Carpien qui paralyse chaque jour un peu plus sa main. Elle refuse car elle ne peut pas payer les soins". Mais ce n'est pas tout. Elle pleure. Apres de longues minutes, elle explique au Dr Nura qu'elle a faim et demande si elle peut avoir 20 Nis (3,6 €) pour acheter du poulet. Elle sera dirigée vers le centre d'action sociale.

"Beaucoup de femmes sont seules. Souvent quand elles sont âgées. Elles n'ont jamais travaillé. C'est très dur pour elles de vivre comme celà. Alors quand elles viennent au dispensaire, même si les motifs sont médicaux, il y a toujours un besoin d'écoute. Elle trouve ici à qui parler. Pas besoin de psychiatre pour faire du soutien psychologique ! Il faut juste avoir le temps, envie et les écouter", nous explique le Dr Nura.


Le dispensaire donne les médicaments aux familles les plus pauvres et peut réaliser des bilans biologiques dont les résultats sont immédiats. S'il faut une radiographie ou un avis spécialisé, les patients sont adressés à l'hôpital public. Grâce à un bon réseau de professionnels de santé autour du dispensaire, un arrangement est le plus souvent trouvé afin que le prix des soins ne soit pas un obstacle à leur bonne prise en charge.

Les consultations se terminent. La journée est passée très vite. Nous nous rendons compte un peu tard que nous sommes le 8 mars. C'est la Journée Internationale de la Femme. Mais à Naplouse, c'est un jour comme les autres. Un jour où la pauvreté qui touche toutes les femmes de la vieille ville, ne devrait plus jamais être une maladie incurable.