A qui profite la Grippe Aviaire ?

A qui profite la grippe aviaire ? - 09 avril 2007 - 20:25
Lire l'article de Salim A. Bourras sur le site actualités news environnements

Des aspects sinistres de la grippe aviaires commencent à apparaître au grand jour. Au-delà de la crise sanitaire, les enjeux économiques ont pris le dessus sur les priorités de santé publique. Criminalisation des élevages familiaux, indisponibilité des vaccins pour les pays pauvres et lobby économique autour de l’octroi des aides, telles sont les autres facettes de cette crise.

Les pays pauvres privés de vaccins - A peine quatre ans après les premières flambées en Asie du Sud-Est, les enjeux commerciaux autour de la grippe aviaire sont devenus aussi importants que ceux autour du sida ou du cancer. Les multinationales pharmaceutiques se sont engagées dans une bataille commerciale à l’échelle planétaire, qui ne fait qu’amplifier l’écart dans l’accès aux soins et aux vaccins antigrippaux, entre pays riches et pays en développement. A cause des contrats d’exclusivités signés entre les puissances économiques mondiales et les transnationales du médicament, les stocks mondiaux de vaccins sont gelés pour toute la première année suivant le déclanchement de l’épidémie (1). Les pays les plus touchés et qui en ont le plus besoin - tels que l’Indonésie ou l’Egypte - en seront privés.

Le jeu dangereux du lobby pharmaceutique - Selon le Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD), les pertes des pays en voie de développement en royalties sur les produits pharmaceutiques s’élevaient à 5.4 milliards de dollars en 1994. Contraint par l’OMS, les pays touchés par la grippe aviaire doivent partager les souches du virus que leurs services sanitaires collectent sur le terrain. Cependant, les organisations humanitaires et citoyennes dénoncent le parti pris de l’Organisation onusienne qui favorise clairement les multinationales. En effet, alors que les laboratoires des firmes peuvent disposer librement de ces souches pour fabriquer des antigrippaux, les pays pauvres n’ont en contre partie aucune garantie de pouvoir en disposer. Les brevets qui protègent ces vaccins permettent aux firmes d’imposer leurs prix et de les maintenir au plus haut niveau.

La faute aux élevages familiaux et aux oiseaux migrateurs ! « Aujourd’hui, plus que jamais, l’agrobusiness utilise cette calamité pour consolider ses chaînes alimentaires ferme-usine-supermarché alors que ses concurrents des petites fermes sont criminalisés » (2). En effet, les élevages familiaux et de petites tailles sont systématiquement criminalisés, notamment dans les cas de contamination humaine. Rappelons, que la première flambée de grippe aviaire en Asie du Sud-Est, et qui avait touché Vietnam, Thaïlande, Cambodge, Laos et Indonésie, s’était produite dans des fermes d’élevage industriel. Selon David Nabarro, coordinateur de l’ONU pour la grippe aviaire et humaine « la vague de grippe aviaire de cette saison, contrairement à celle de la saison dernière, est largement propagée par le commerce de volailles, contrairement à celle due à la migration d’oiseaux sauvages contaminés ». Les oiseaux sauvages ont eux aussi bénéficiés de ce « traitement spécial », et selon GRAIN, « les gouvernements continuent à débiter impudemment la théorie de l’oiseau sauvage afin d’échapper à leurs responsabilités. Il y a à peine quelques semaines, les autorités moscovites ont attribué aux oiseaux migrateurs un cas de grippe aviaire aux abords de la ville – au beau milieu de l’hiver russe ».

Des pays qui résistent - Certains pays, comme l’Indonésie et l’Inde, choisissent la voie de la résistance. L’Indonésie a refusé de partager les souches du virus H5N1 collectés sur son territoire car pour la ministre indonésienne de la santé, il n’est pas question de mettre ces souches à la disposition de l’industrie pharmaceutique qui s’en servira pour fabriquer des vaccins que sont pays ne pourra pas payer. Selon GRAIN « l'Indonésie n'était pas le premier gouvernement à cesser d'envoyer des échantillons du virus de la grippe aviaire à l'OMS. La Chine l'avait déjà fait ». L’inde pour sa part, et à travers ces deux principaux fabricants de médicaments génériques, a exprimé sa volonté de fabriquer du Tamiflu générique à bas prix, sans attendre l’autorisation des laboratoires suisses Roche.

(1) Grippe aviaire : pas de vaccin pour les pays pauvres !
(2) La grippe aviaire: une aubaine pour "Big Chicken". Publications "Against the grain" 2007